Les îles anglos normandes

Herm

Par une journée maussade, Boisbarbu quitte le port des Bas Sablons (Saint Malo), pour tourner la fameuse bouée cardinale ouest du plateau des Minquiers, pour remonter au près sur Guernesey par un frais nordé.
Boisbarbu en compagnie du bateau des grenoblois, skippé par Hervé, un Ovni 36, moins rapide, mais capable de se poser sur le sable à basse mer, grâce à sa dérive relevable et son safran pivotant.
Le mouillage de Herm nous offre un abri parfait quand nous y arrivons à mi marée. A la suite de notre tour de l’ile à pied, la pleine mer a englouti les rochers qui nous abritaient. L’endroit est devenu malsain. Il nous faut le quitter pour trouver refuge dans l’anse Pembroke au nord-est de Guernesey.

Sarcq

En dépit de ses mouillages très rouleurs et inconfortables, Sarcq a un charme tout particulier, très british, une épicerie bazar, un jardin botanique, quelques gites, un pub, et … cinq banques ! Port Creux, minuscule et d’entrée étroite, ne convient pas au tirant d’eau de Boisbarbu. Pour rester abrité dans Port Creux à basse mer, il faudrait pouvoir poser sur le sable, ou béquiller, ce qui est impossible avec son lest haut et fin.

Guernesey


Les côtes ouest et nord à vélo

La côte sud à pied

Les Tas de Pois de Guernesey, peints par Auguste Renoir, pendant sa villégiature sur cette île

La maison de Victor Hugo ou il maintient son exile durant près de 20 ans, avant son retour triomphal à Paris et son enterrement au Panthéon. L’architecture intérieure et la décoration sont à l’image de l’auteur. Originalité, romantisme, démesure, alternance de l’ombre et de la lumière. Pourtant l’écrivain dormait et vivait principalement dans la pièce la plus simple et la plus exigue. Ayant vécu mon enfance à quelques pas de sa maison natale, je ressens sa marque dans la culture et les valeurs de notre bonne ville de Besançon.

Jersey
Le bateau de nos amis anglais, John et Sue, un J109, affuté pour les régates, prépare la course du Fastnet en aout. Ensemble, nous visitons Jersey, son zoo et ses jardins.

Granville

Le seuil d’entrée du port de Granville retient l’eau du port pour maintenir les voiliers à flot quelque soit l’heure. Une fois amarré à un ponton, c’est impressionant de voir le niveau de la mer descendre de plus de 12 mètres ! et de découvrir des kilomètres de plages et rochers, là ou nous sommes passés quelques heures auparavant.

Les grandes maréees sont l'occasion pour les locaux de pratiquer la pêche à pied. Nous assistons à un pélérinage de centaines de gens, bottés et armés d'un seau et d'un racloir pour récolter les fruits de la mer, qu'ils pourront déguster ce soir autour d'une bouteille de blanc.

Chausey

Chausey est un archipel de milliers d’ilots et cailloux que l’on découvre à basse mer. La superficie de l’ile devient alors 100 fois plus importante qu’à pleine mer. Surtout en ces jours de grands coefficients que nous avons le privilège de vivre. Le paysage est multiple à l’infini, au fil des heures de marées, au fil des éclairages du soleil ou de la lune. Chausey restera la perle de notre saison 2013.

C’est dans cette maison que vécu Marin Marie, marin aventurier aux multiples traversées solitaires puis peintre officiel de la marine par ses chefs d’œuvre décrivant les bateaux du XXème siècle.

Dans l’archipel de Chausey, 12,5m de marnage: le plus haut d'Europe et le 2ème au monde. C’est plus que la hauteur d’un immeuble de 4 étages. Imagine, ton bateau au niveau de la rue à 10h du matin, puis perché sur le toit de l’immeuble à 16h ! hissé par la force colossale de la mer, de ce phénomène de marée, principalement dû aux positions de la lune et du soleil par rapport à notre terre. En 6 h, la mer monte ou descend de 12,50m ! A mi marée, j’ai vu le niveau de l’eau monter de 3,50m en une heure: plus de 50cm tous les 10 minutes. Quand tu débarques à terre avec l’annexe, il vaut mieux prévoir de la remonter très haut sur la berge, si tu ne veux pas la retrouver loin sous l’eau au terme de ta promenade. Ces garndes marées sont surpassées pr celles de la baie de Fundy, en Nouvelle Ecosse (Canada) ou le marnage peut atteindre 21m !

Au sud de Chausey se dresse le Mont Saint Michel, merveille du monde, planté au milieu d’un océan. Ici, en arrière-plan des prés salés. Océan de sable large d’une vingtaine de kilomètres à basse mer, en ces jours de vives eaux. Pour s’y aventurer, il vaut mieux bien savoir par ou en ressortir quand la mer remonte. A mi marée, l’eau avance à 6 km/h, alors avec cette onde à ses trousses, mieux vaut ne pas avoir son chemin barré par une rivière ou une mare de l’estran.

En dépit de leur beauté majestueuse, ces grandes marées présentent des contraintes, pour nous autres navigateurs. Comme les puissants courants qui s’engouffrent dans les chenaux de Chausey et qu’il vaut mieux anticiper avant d’entreprendre une manœuvre ou un mouillage. Il est également difficile de trouver un coffre (une bouée) ou s’amarrer en sécurité. La mer se retire tellement, comme aspirée par l’attraction combinée de la lune et du soleil, que les bouées aménagées par la CCI (Chambre de Commerce et d’Industrie de Normandie) ne sont pas sures pour Boisbarbu à basse mer. La bouée la plus au sud du chenal du Sound, qui est pourtant celle en eau la plus profonde, n’a plus qu’ 1,50m d’eau à basse mer. Nous déplaçons Boisbarbu quelques heures sur le coffre des Douanes, pourtant strictement interdite au plaisancier, mais en eau plus profonde. Les appendices métalliques de ce coffre sont très agressives pour la coque polyester de Boisbarbu. Et sous l’action combinée mais toujours changeante du vent et du courant, ce coffre passe de bâbord à tribord en tapant violemment sur l’étrave ou sur les bordés de Boisbarbu. Dans ces cas-là, on se creuse vite la tête pour trouver et expérimenter une solution. C’est bien cela qui est intéressant, plus que le problème posé. Je protège le tribord avant de la coque par la passerelle de quai (longue planche de bois), séparée de la coque par 4 pare battages, parfaits amortisseurs des coups de butoir. Puis un amarrage particulier nous bloque le coffre sur tribord pour toute la nuit. Ouf !

Ayant visité Aurigny en 2010 (Alderney, en anglais), nous l'avons délaissée cette année. Comme en Bretagne nord, il est difficile de trouver un mouillage bien abrité dans les anglos. L'amplitude de la marée est telle, que là ou l'on se croit protéger à basse mer, cela devient très inconfortable et exposé à pleine mer, les rochers alentours ayant disparus sous l'eau et le profil de la côte étant complètement modifié et s'étant éloigné considérablement du bateau.
La Bretagne nord est en cela unique en Europe. En dépit de ses paysages sauvages, austères et magnifiques, elle n'offre que peu d'abris au mouillage à un voilier comme Boisbarbu. Nous sommes donc contraints la plupart du temps à nous abriter dans les ports de plaisance, qui sont d'ailleurs accessibles par un seuil, durant seulementquelques heures autour de la pleine mer. Pour naviguer en Bretagne nord, il faudrait un voilier à faible tirant d'eau, qui puisse se poser sur le sable des plages à basse mer, rentrer dans les ports dans de larges plages horaires, poser dans les ports de pêche. Mais il n'y a vraiment que la Bretagne nord qui présente ces contraintes. Ce n'est pas le cas du sud, ni de l'Angleterre ni de l'Ecosse, ni de la mer du nord. Je n'échangerai donc pas Boisbarbu contre un biquille ou un dériveur intégral, pour cette unique navigation.

Kenavo !

 

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