L'eau à bord : une denrée rare et précieuse
Que ce soit en longue traversée, ou même à travers un
archipel d’îles peu équipées, l’eau douce est à consommer
avec parcimonie. Boisbarbu est equipé de reserves d’eau d’une capacité
de 300 litres, et nous devons parfois vivre en autonomie pendant plusieurs semaines.
Le meilleur exemple fut le parcours Canaries-Cap Vert-Antilles, où nous
avons été 6 semaines sans pouvoir faire le plein d’eau. Il nous
fallait restreindre notre consommation journalière à 7 litres
pour un équipage de 4 personnes. Imaginez donc les conséquences
: il n’est evidemment pas question de prendre une douche, ni de faire la vaisselle,
ni la lessive à l’eau douce…
Non, les 7 litres sont consacrés à la boisson de l’équipage,
ce qui est déjà très peu, et au brossage des dents : 1
verre d’ eau par personne.
La vaisselle se fait à l’eau de mer, dans un seau ou sur l’évier
(l’eau de mer arrive à l’évier par une pompe à pieds).
La douche : avec des seaux d’eau de mer, dans le cockpitt, ou directement dans
la jupe arrière pour les plus téméraires. La savonette
ne mousse pas du tout à l’eau de mer. On peut donc utiliser un savon
liquide special eau de mer, vendu très cher par les shipchandlers, ou
tout simplement un savon liquide quelconque, qui mousse tres bien. Etonnament,
les cheveux shampoinnes à l’eau de mer ressortent propres et soyeux.
La lessive : seul Yves lavait ses tee-shirts à l’eau de mer pendant la
Transat. Avec une lessive liquide, il paraissait en être très satisfait.
Le lavage du pont et du cockpitt se font à l’eau de mer.
L’eau douce est donc l’objet d’une grande attention, telle une matière
précieuse, et donc source de frustrations.
Boisbarbu est equipé d’un compteur d’eau très précis, permettant
de contrôler chaque soir notre consommation, et d’ajuster en conséquence
celle du lendemain. Au dela des frustrations, nous redécouvrons la valeur
de l’eau douce et la manière de la respecter.
Mais alors, à quoi sert le dessalinisateur dont Boisbarbu s’est doté.
Et bien, cet appareil très complexe dans son utilisation et dans sa maintenance,
est très gourmand en énergie. Or, notre énergie
est comptée. Par ailleurs, il ne fonctionne pas en traversée.
En effet, par une vitesse supérieure à 5 N, un effet de cavitation
se produit au niveau du passe-coque d’arrivée d’eau de mer, et le dessalinisateur
se désamorce (ça, ce n’etait pas indiqué dans la notice
du constructeur). Ce dessalinisateur ne nous a donc pas servi durant la traversée
de l’Atlantique. Par contre, aussitôt arrivés dans les criques ensoleillées
et ventées des Antilles (générateurs d’énergie électrique),
il se mit à fonctionner normalement et à produire, en 2 heures,
10 litres d’une eau douce et sans goût.
Autre mauvaise surprise qui nous attendait en fin de Transat : malgré
nos économies d’eau, les reservoirs ont été vides beaucoup
plus tôt que prevu. En effet, par forte gite, les reservoirs se dévidaient
lentement à la mer, par leurs circuits d’aération. J’ai depuis
installé 2 vannes supplémentaires pour pallier à ce probleme.
Je pense qu’à la suite de cette expérience, l’eau de Grenoble
coulant facilement du robinet, sera pour nous un luxe que nous saurons savourer.
Gérard