Retour de la "ballade" irlandaise

Dingle était le but de ce voyage. Nous y avons passé 4 jours, à visiter, écluser des bières, se saouler de musique irlandaise, essayer des pull-over de laine, ... Mais il est temps de faire du sud, en privilégiant les îles d'ouest Irlande ainsi que les ports manqués à l'aller.

Les îles Blaskett

De Dingle, plein ouest pour atteindre les îles les plus à l'ouest d'Europe: les Blaskett. Parois rocheuses extrêmement sauvages et déchiquetées, ou nichent des milliers (sans doute même des millions) d'oiseaux de toutes sortes.

Les macareux apparaissent par centaines, et entourent notre bateau. Nous rigolons de leur décollage maladroit en agitant les ailes et en tapant des pattes sur l'eau. Ils sont adorables avec leur bec orange et jaune, et croient se protéger de notre approche en se cachant la tête sous l'eau ! :)

Boisabarbu et Hulie sont les seuls au mouillage, roulant bord sur bord. Ma parade: aller porter un mouillage à l'arrière à bord de l'annexe pour placer Boisbarbu perpendiculairement à la houle, sous le regard intéressé d'une douzaine de phoques. Ca marche, et nous passons un diner paisible à bord avec l'équipage d'Hulie: Martine et Gérard. Quand ils repartent vers 22h, avant l'étale de basse mer, nous remarquons que Hulie est très proche de la plage et roule beaucoup. Le lendemain, nous apprenons qu'ils ont passé une très mauvaise nuit d'angoisse. Hulie a talonné sur sa quille et sa dérive pendant plus d'une heure alors que les rouleaux le poussaient vers la plage, sans qu'ils puissent s'en dégager. Le safran a souffert, de l'eau s'infiltre dans le bateau. Avarie inquiétante.

Les îles Skelligs

Splendeur des splendeurs ces 2 îles pyramidales aux parois abruptes. Très célèbres en Irlande, l'une pour son monastère franciscain du 7ème siècle et l'autre pour sa colonie de fous de bassan qui l'habillent comme une couche de neige.

Cortège d'aiguilles et de pics, ornée par des arches, elle force l'admiration et a été le siège récent d'un tournage de Star Wars. Dans l'impossibilité totale de pouvoir ancrer dans ces 2 îles, mais emplis de ces images d'un autre monde, nous faisons cap à l'est vers la terre, vers la péninsule du Kerry.

Ballinskellig

Mouillage très abrité des vents d'ouest, à l'extrémité nord de la baie de Waterville. Nous amarrons à 2 bouées improbables quand un bateau moteur vient nous prévenir que ces bouées appartiennent à la vedette qui fait visiter les îles Skelligs aux touristes. Il nous prévient qu'il va se renseigner au village (à 2 milles de là) pour savoir si on gêne. Une demi heure plus tard, il revient pour nous dire avec le sourire que nous pouvons rester là pour la nuit. Encore un bel exemple de l'accueil irlandais.

Crookhaven

Avec un départ du mouillage à la voile, la journée démarre bien. Le vent se renforce, Boisbarbu et Hulie glissent à vive allure sur l'onde encore calme.

A l'approche du Dursey Sound, le ressac nous bouscule dans une mer hachée. Nous passons le Dursey Sound sous voile, avec le courant.

Les 2 moutons bleus aperçus à l'aller sont toujours là. Le soir, après notre passage devant Mizen Head, dans une mer bouillonnante de vent contre courant, la passe de Crookhaven: Alderman Sound, nous accueille sous le crachin et nous protège comme dans un écrin. Le pub est encore ouvert, mais le village est très calme.

Fastnet Rock

Le rocher du Fastnet est un endroit mythique pour les voileux. De nombreux bouquins décrivent les drames qui se sont déroulés ici, du temps de la piraterie, ou lors de la course du Fastnet qui chaque année réuni une centaine de voiliers qui de la côte sud d'Angleterre vont tourner ce rocher avant de revenir vers la ligne de départ. Nous ne pouvions pas passer dans cette pointe sud-ouest d'Irlande sans tourner ce Fastnet Rock, au large de Baltimore. Mais faire ça sous spi, c'était la cerise sur le gâteau. Fierté de voir son bateau sous spi, passer le Fastnet.

Barloge Creek

L'entrée de la calanque de Barloge se confond dans les falaises, et seul le GPS nous permet de la détecter et de s'y diriger directement du large. Il est bien difficile de trouver la place pour mouiller 2 bateaux. Devant nous, The Rapids, véritable torrent tumultueux à mi marée, communique avec le petit lac Lough Hyne.

L'endroit est magnifique, un rayon de soleil aidant, il fait presque doux. Nous sirotons un verre de pastis dans le cockpit !

Courtmacsherry

Plein vent arrière, voiles en ciseau, génois tangonné. Au passage de Galley Head, le courant et le clapot malmènent Boisbarbu. J'étais à la table à carte quand le pilote automatique décroche et tombe en panne. Au cri d'Evelyne, je me précipite dans le cockpit, mais trop tard: la grand-voile empanne violemment et l'écoute me prend par le cou pour me basculer sur bâbord. Evelyne se cramponne pour ne pas passer par dessus bord. Le choc a été violent pour la mature. Je vérifie visuellement tous les points du gréement. Rien n'est cassé. Le frein de bome a certainement amorti le choc. Le risque était que le tangon pique dans l'eau et que le génois chalute au risque de poinçonner et casser le mat. Enroulons le génois, je détangonne, et empanons la grand-voile. Je commence à avoir des doutes sur ce nouveau pilote automatique installé en 2016.
Par ce solide vent d'ouest, il nous faut trouver un bon abri pour la nuit. L'estuaire puis la rivière Argideen nous conduisent jusqu'à Courtmacsherry. Le chenal étroit car souvent ensablé par les mouvements de la mer, est bien balisé par des bouées latérales vertes que l'on laisse sur tribord en ayant les yeux sur le sondeur. Sous le crachin, nous identifions les 2 bouées qui vont nous sécuriser pour la nuit dans les alternances d'un fort courant. Comme chaque soir, nous sommes les seuls bateaux au mouillage. Sous cette pluie battante, pas la peine de mettre l'annexe à l'eau pour visiter le village embrumé qui semble mort. Tout est silencieux et humide.

Kinsale

Comme en juin lors de notre arrivée en Irlande, nous amarrons au ponton de Kinsale, sous la pluie, accueillis par un responsable du Yacht Club. Luxueux et très actif yacht club ou nous nous réconfortons d'un irish coffee et prenons une douche bien méritée. Au pied du mât, je remarque la poulie de renvoi de drisse de génois qui se fendille. Elle est prête à éclater. Je la remplace immédiatement. En mer, il vaut mieux anticiper les problèmes techniques, qui souvent s'enchainent pour provoquer des avaries sérieuses. Sur un bateau, la perfection est tout juste suffisante. Tout ce qui peut casser, va casser ! Alors quand on a un doute, il faut agir sans hésitation pour réparer. Des bricoles comme ça, j'en ai tous les jours ...

Steve, le capitaine du port, nous reconnait et nous informe qu'il organise demain une bouillabaisse ! sur le ponton, pour célébrer Bastille Day (14 juillet). Nous serons en mer, dommage...

Traversée de Kinsale aux Scillys

Cette traversée promettait d'être rapide et commençait pour le mieux: Boisbarbu file à 7 noeuds, par vent de travers. Dans l'après-midi, le vent adonne et forcit. Notre vitesse augmente, alors que la mer se forme. Empannage intempestif ! Le pilote a encore décroché. Il barre mal, n'est pas assez rapide à contrer les mouvements du bateau imposé par les vagues, tarde à revenir sur sa route après un départ au lof. C'est fini, je n'ai plus confiance dans ce pilote. Sans cette confiance, je ne suis plus capable de lui laisser gérer la barre dans cette mer qui devient forte et le vent qui gronde dans nos voiles encore toutes dehors. Alors je barre, je barre, je reste à la barre 13 heures de temps, pendant qu'Evelyne gère la navigation, les voiles et la tambouille. Mes jambes s'ankylosent, mes épaules se crispent. Nos harnais sont capelés, la nuit tombe, la pluie m'empêche de voir l'anémomètre.

Au petit matin, quand nous approchons les Scillys, le ressac secoue Boisbarbu comme un sac de noix. Les Scillys sont très peu protégées par vent fort. Je connais un petit refuge: Little Bay, à l'est de St Martins. Rester concentré jusqu'au bout, pour se faufiler entre les récifs qui protègent Little Bay. Les voiles sont affalées, l'ancre file, avec 30m de chaine. Après 19 heures de traversée, tout devient calme. La tension se libère. Nous nous écroulons sur nos couchettes. Il est 6h du matin.

Traversée des Scillys vers la France

Nous devions nous reposer et passer quelques jours de détente dans ces belles îles des Scillys. mais l'étude des fichiers grib et du bulletin météo nous font décider d'entreprendre la traversée demain. Une belle fenêtre météo s'ouvre à 4h du matin, pour une traversée rapide (18 heures), par un vent de 15 à 20 noeuds, à la lumière du jour. C'est une journée de bonheur, un beau moment de voile: un trait de 110 milles au cap 140°, sur une mer très maniable, agitée tout au plus, avec un vent de travers ou de 3/4 arrière. Même le rail d'Ouessant, malgré un traffic conséquent, ne nous pose aucun souci. Le logiciel de navigation (OpenCPN) couplé à l'AIS, montre les cargos montants et descendants avec qui nous risquons une collision. L'AIS nous donne pour chaque navire: son nom, son pavillon, sa longueur, sa position, sa destination, sa vitesse, son cap, et dans le cas d'une collision possible, la distance de cette collision éventuelle et le temps pour y parvenir. En fonction de ces informations, nous décidons de modifier notre route pour passer derrière le navire en cause, ou de le contacter par la VHF pour convenir d'une modification de route. Très souvent nous pouvons observer que les cargos se détournent de quelques degrés pour nous éviter.

De très belles vitesses, sous génois le matin et sous spi asymétrique l'après midi. La présence des dauphins à 5 ou 6 reprises dans la journée, couronnent cette belle page de navigation et notre beau périple irlandais. Le phare de l'île Vierge, puis la cardinale ouest Liebenter à l'horizon, jalonnent notre entrée dans l'Aber Wrac'h, havre devenu familier et toujours aussi beau. Relâche et visite ensoleillée à notre amie Christine "de Bretagne".

A bientôt !

 

 

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