Le Journal de Bord de BOISBARBU

Les Açores

Archipel de 9 îles s'étendant sur 600 kms. "Perdu au cœur de l'Atlantique, le plus profond des secrets se dévoile. Sous le silence à peine deviné, entre le vert des fajãs et la mer bleue des baleines, la mémoire d'un peuple jaillit en cascade, ornée d'hortensias, nées dans le cœur de chaque Açoréen. L'âme enferme le chant de la terre, que le vent emporte et fait écouter à ceux qui n'en savent rien. Une utopie devenue réalité, l'Homme se fond avec la terre et le ciel et, plein de fierté, il se laisse emporter par son destin. Un paradis éloigné qui persiste à se cacher au milieu de la brume et du chant des mouettes."

Après avoir salué les copains restés à quai, que nous espérons retrouver cet été aux Açores, nous quittons le quai de Funchal vendredi 5 Juin à 11h. Drôle d'idée pour des marins d'entreprendre une traversée un vendredi, mais tant pis, on n'est pas superstitieux. Gérard (notre équipier) le regard perdu dans ses souvenirs de navigation en Antarctique nest pas inquiet.

La météo semble correcte, sinon favorable. Le vent, on l'aura de toute façon dans le nez, ça on s'y attend sur cette partie du parcours. Mais ce vent là est annoncé modéré et avec des oscillations entre ouest et nord-ouest qui devraient nous permettre d'enchaîner des bords favorables. Fichiers Grib, logiciel de routage sont formels, nous seront à Santa Maria des Açores dans 4 jours.

A la sortie du port, nous sommes cueillis par un vent portant d'est. Une aubaine incroyable. Mais ne nous y trompons pas, il s'agit juste d'un immense rouleau de vent créé sous l'île de Madère, qui ne dure qu'une heure et que remplace un vent de face à 30 nœuds dans un ressac pénible pour nos estomacs. C'est notre vent de nord ouest attendu, mais largement démultiplié par le venturi que forme Madère au milieu de l'océan.

 

Les 600 milles qui suivent se déroulent au près, le vent dans le pif. Hou la la, les estomacs. On passe par toutes les couleurs, malgré le MerCalm et quelques semaines d'amarinage. Une belle dorade coryphène au bout de la ligne puis rapidement dans la poêle. Hmmm ! Pas de dauphins, mais des tortues, et des centaines de mollusques flottants.

On est un peu secoué, un peu fatigué, l'estomac en vrac, mais bon, ça avance. Et après 600 milles et 4 jours et demi, nous arrivons vers 10h du soir devant le port de Santa Maria des Açores.

En 2001, nous nous étions promis de revenir un jour aux Açores avec Boisbarbu. Ca y est, c'est fait.
Comme quoi, on peut prendre ses désirs pour la réalité quand on croit à la réalisation de ses désirs !

Santa Maria

Une marina toute neuve, juste construite pour nous. Les pontons sont vides et richement équipés de bornes électriques neuves. Que du luxe, et tout ça pour nous. Nous choisissons donc une place facile à prendre pour amarrer Boisbarbu à un catway.

Un rinçage complet du pont à l'eau douce, un vrai dîner : réconfortant, et hop au dodo pour un lourd sommeil bien mérité.

Une heure de formalités avec la police, les autorités maritimes, la douane. Que des fonctionnaires très souriants, accueillants, sympas. Décidément, ces portugais, on les aime bien. La douche qui réchauffe et délasse, l'apéro au « club navale », les rencontres autour du bar, puis la visite du village, que dis je , la capitale de l'île : Villa de Porto, 2000 habitants qui nous accueille dans le calme et les charmes des Açores.

Santa Maria est l'île la plus orientale de l'archipel des Açores. Petite, quelques hameaux très calmes. On ne voit ici que de très rares touristes. L'île est trop loin des itinéraires des voiliers et un peu oubliées par ses consoeurs en dépit de sa grande plage de sable clair. Ca nous va bien. Santa Maria était avec son aéroport de 4km de long, l'escale obligatoire des vols Europe-USA du temps ou l'autonomie en carburant obligeait un ravitaillement.

D'étranges mollusques apportés par la marée, se prélassent sur la plage. Les mêmes que ceux vus au large pendant la traversée.

Petite chapelle devant la statue de Christophe Colomb. Christophe à son retour des Caraïbes fait escale à Santa Maria et selon son vœu vient prier avec son équipage dans cette chapelle, ou il fait don du triptyque qui ornait le bateau Santa Maria.

Sao Miguel

La plus grande et plus peuplée des Açores. Capitale Punta Delgada, là d'où nous avions rejoint le Portugal en Juillet 2001.

Je repasse devant les autorités : police, immigration, douane, bureau de la marina. Les formalités sont longues et studieuses mais toujours avec le sourire de l'accueil. Bien que nous soyons en Europe et même dans l'espace Schengen, le Portugal impose les formalités d'entrée et de sortie pour chaque île. Anne, notre équipière anglaise, n'est pas dépaysée parmi les jardins abondemment fleuris d'hortensias.

Nous louons une voiture avec nos amis et visitons l'île : randos, lacs volcaniques, points de vue à couper le souffle, sources chaudes et sulfureuses des caldeiras, fleurs sur les bords des chemins : hortensias, agapanthes, vipérines, impatiences, lys, … que du beau.

Le climat permet même la culture du thé. Nous les visitons, avant notre séparation émue.

Marcel Cerdan perdit ici la vie en Octobre 1949, dans le crash d'un avion Constellation joignant Paris à New York ou il devait rejoindre Edith Piaf. Arlette nous rejoint en Airbus A310, sans souci.

Sao Jorge

Accompagnés par les pétrels et les sternes, 130 milles d'une traversée sympathique, au portant, nous amène à la minuscule marina de Velas au sud ouest de l'île de Sao Jorge.

Ile centrale de l'archipel, la plus effilée, Sao Jorge est peu visitée. Un seul hôtel, 2 restaus, des dizaines d'églises, des centaines de têtes de bétail, des milliers d'animaux à grandes oreilles, pour 3000 âmes. Nous sommes sous le charme de Sao Jorge, ses haies d'hortensias, ses falaises recouvertes d'une végétation luxuriante, sa marina miniature, ses villages de bout du monde, son accueil authentique et chaleureux, ses traditions à l'occasion des fêtes de la St Jean, le tout sur fond du volcan Pico (2350m). Une longue marche sur le Pico de Esperanza, ou un avion de ligne s'est écrasé par brouillard le 11 décembre 1999; crash qui a porté le deuil sur l'archipel.

Nous y célébrons l'anniversaire d'Evelyne. Le brouillard et la bruine nous accompagnent dans nos marches.

Faial

A Horta, l'escale se charge d'histoire, de traditions, et surtout d'émotions. L'émotion qu'on peut lire dans le regard délavé des marins arrivant de leurs longues traversées, les yeux bouffis de sel et de sommeil, les cheveux en bataille poisseux des embruns, des récits plein la tête, des sanglots dans la voix, pour meubler les longues soirées chez Peter. Ils arrivent des Antilles, du Canada, des Bermudes, de Madère, de Bretagne ou de Gibraltar. Certains ont démâté, un autre a croisé un voilier fantôme, celui-ci a écrasé sa proue contre un cargo, celui là s'est fait retourné par une vague scélérate, par bonheur il était harnaché. Tous ont à se raconter. On vient chez Peter dans l'atmosphère humide du brouillard et de la bière, même si la tradition nous fait commander un Gin fiz. Horta est pour le marin de l'Atlantique ce que Katmandu est pour l'himalayiste.

Peter et son Café Sport perpétuent le mythe de l'escale : entre deux traversées, en proie à l'incertain, l'escale a la rassurance du tangible, la sérénité de savoir que l'on va trouver un abri en arrivant, et y laisser un bout de son âme en partant. L'escale est cet instant clos dans le temps et le souvenir, un point sur la carte, que l'on croit retrouver intact en y revenant. Mais l'escale n'est belle que quand on la découvre la première fois et quand on s'en souvient.

Sur les quais d'Horta, un Mélody démâté attire notre attention. Nous compatissons pour Jacques et Danielle qui ont démâté au large des Bermudes et ont fait 15 jours moteur pour rejoindre les Açores en se faisant ravitailler en carburant par un cargo dans une grosse mer. Nous nous lions d'amitié avec eux au cours des semaines que nous passons à Horta.

Un matin, nous recevons la visite de Claude, qui a troqué son « Fruit de la Passion » contre « Petit Nuage ». Nous l'avions connu au Liban en 2006.

Après 8 années, je redonne un coup de Ripolin à la fresque de Boisbarbu sur le quai, qui en compte des centaines.

Le Scrimshaw vient du temps de la chasse à la baleine, quand la monotonie des longs voyages était comblée par cet art de graver des images sur les dents de baleine. De nos jours, cet art est l'apanage d'un autre genre d'aventuriers, qui se laissent séduire par la terre ferme : les artistes. Ils continuent à graver sur cette matière si parfaite, les scènes de vie maritime, de pêcheurs de baleines, des plus beaux navires, les portraits des Moitessier, Tabarly, Chichester, … avec ce mélange de nostalgie et de tendresse qu'est la "saudade".

Arlette a descendu son petit sac à terre (le plus petit de tous nos équipiers). Il faut bien repartir pour la France alors que la vie est si douce aux Açores. Mais consolation, elle s'envolera aussitôt pour le Ladakh.

Faial, c'est aussi cette curiosité vulcanologique : en 1957, à l'ouest de l'île, une irruption sous marine a fait naître un volcan, une presqu'île de 3km2 sous les yeux apeurés des habitants. Qu'il est curieux de marcher sur une montagne aux reliefs lunaires, qui a juste 50 ans alors que nos montagnes ont des millions d'années. Qu'il est bizarre ce grand phare caché de la mer par cette nouvelle montagne.

 

 

 

 

En 1919 le premier vol transatlantique fait escale à Horta. Il faut dire que l'île de Faial occupe une position centrale en Atlantique nord. Quelques distances : 1100 milles de Gibraltar, 1200 milles de Brest, 1500 milles de Dakar, 1400 milles de l'Ecosse, 1200 milles de Terre Neuve, 1500 milles de Nouvelle Ecosse (Canada), 1800 milles des Bermudes, 2100 milles des Antilles.

Flores

En planifiant ce voyage aux Açores, je m'étais promis de retourner à Flores, l'île la plus occidentale de l'archipel. Endroit mythique pour moi, puisque c'est là que nous avions atterri en Juin 2001 après 21 jours de large en provenance de Floride. Et puis Flores est réputée par les Açoriens comme étant la plus belle, la plus fleurie, la plus sauvage. Alors bravant les réticences d'Evelyne je fini par la convaincre qu'un créneau météo s'ouvre à nous pour atteindre Flores en 24h depuis Horta. Dès notre départ d'Horta, la pluie succède au crachin, le vent favorable se transforme en un vent adverse, de face, de plus en plus fort. Le ciel est noir, la mer forte puis très forte succède à la mer agitée. Pour couronner le tout, nos estomacs pourtant bien amarinés changent de couleur, ce qui a un effet désastreux sur le moral. Après 100 milles à taper dans les vagues et à se faire rincer d'eaux douce et salée, au petit jour, à seulement 40 milles de Flores, l'île désirée, Evelyne et moi nous regardons d'un air triste. L'anémomètre indique 38 Nœuds. Pas besoin de mots, la décision est prise. Nous remontons sur le pont, Evelyne pour choquer la grand voile et moi pour abattre à la barre. En quelques minutes, le vacarme du près se transforme en chevauchée grisante sur les grosses vagues. Flores est définitivement dans le sillage, et notre moral en berne. 40 heures après en être partis, nous sommes à nouveau dans le port d'Horta, ou trop fatigués pour trouver une place à quai, nous jetons l'ancre, l'âme en peine, dans l'avant port. Une soupe chaude vite avalée et 10 heures de sommeil bien méritées. La mer n'a pas laissé passé Boisbarbu. Un bon rappel à l'humilité.

Le lendemain matin, le ciel brille sur Horta. Nous sommes au comptoir de la SATA pour réserver 2 billets d'avion pour Flores ! La honte ! N'en parlez surtout à personne. Mon honneur de marin en serait terni.

Nous prenons place dans l'avion à destination de Flores, un ATP bi hélice. Dans 40mn, nous devrions atterrir à Santa Cruz de Flores. Après 20mn de vol, l'avion est pris dans de violentes turbulences et n'obtient pas l'autorisation d'atterrissage en raison du brouillard et des vents forts. Nous sommes bien secoués. Une femme pleure et crie dans l'avion pendant toute l'heure ou nous tournons en rond au dessus de l'aéroport. Nous apprenons plus tard que son père était décédé dans le crash de l'avion sur le Pico Esperanza … Encore une heure et l'avion se pose enfin. Nous filons à l'extérieur pour prendre un taxi pour Santa Cruz. C'est un dialogue de sourd au terme duquel on réalise qu'on n'est pas à Flores, mais de retour sur Horta que nous avions quitté tout à l'heure. La SATA (compagnie aérienne portugaise) nous offre 24h dans le Faial Hotel, hôtel de luxe 4 étoiles qui domine le port d'Horta, ou se dandine tranquillement Boisbarbu. Evelyne et moi sommes pris d'un fou rire qui nous dure toute la soirée à nous voir dans ce confortable hôtel, aux frais de la princesse, au dessus du port d'Horta. Quel contraste ! Décidément , Flores ne veut vraiment pas de nous. Devons nous vraiment y faire une troisième tentative.

Ca y est, nous y sommes enfin. Le minuscule aéroport construit en 2007 nous reçoit dans son hall à peine plus grand que notre jardin. Il pleut des cordes. Un couple d'açoriens nous propose de nous guider vers une chambre à louer à une vingtaine de kilomètres de là. Je cherche en vain une voiture à louer : l'unique agence de location n'en n'a plus. Un portugais dans le hall me propose sa voiture. Il me donne ses clés. Pressés de suivre le jeune couple, j'oublie de demander le nom et l'adresse du propriétaire de la voiture. Il n'a pas non plus mon nom. La confiance ! Le lendemain, j'ai un peu du mal à retrouver sa trace pour lui rendre la voiture. Mais Santa Cruz, capitale de Flores est une très petite ville ou tout le monde se connaît.

Flores, la pierre précieuse des Açores, le cristal d'émeraude dans l'écrin bleu profond de l'Atlantique. Elle est la plus à l'ouest de nos terres européennes.

Chaque soir, nous nous rendons au port, discuter avec les rares marins qui s'arrêtent dans ce mouillage inhospitalier. Nous faisons la connaissance d'un jeune couple, sur « Ulysse » qui nous donnent des nouvelles de Guy et Sylvie de « Takari », qu'ils ont croisé à Cuba.

Flores est couverte d'hortensias, de canas, de roses, au milieu des quelles des milliers de lap… (animaux à grandes oreille) batifolent et s'éparpillent à notre approche. Végétation subtropicale très dense, sapins, fougères, mousse épaisse de plusieurs dizaines de centimètres contre les parois rocheuses, que dévalent de longues cascades spectaculaires. Nos journées de rando à Flores sont un délice. Nous sommes ébahis par toutes ces fleurs, le calme de l'endroit, l'accueil des habitants.

A Flores comme dans toutes les îles de l'archipel, nous sommes en admiration devant les Açoriens, le charme de leur accueil, la qualité de leur travail, leur désir d'améliorer et d'enrichir leur pays. C'est un plaisir de savoir que nos impôts pour la communauté européenne sont ici bien utilisés, par des gens qui ont du talent, de la volonté, et qui savent donner de la valeur à leur pays, dans l'utilisation intelligente et efficace des subventions de l'Europe. Nous sommes bien loin du triste constat grec, ou l'argent de la communauté est souvent détourné ou dilapidé dans des travaux mal faits, ou jamais finis. Plus je connais les portugais, moins j'aime la Grèce.

Corvo

La plus petite île des Açores, peuplées de 300 habitants, Corvo a son cratère de volcan, cultivé et couvert de fleurs. Aujourd'hui les habitants sont occupés à marier un des leurs. Nous assistons à la cérémonie. Le gros Zodiac qui nous amène sur cette île nous fait découvrir le labyrinthe de rochers volcaniques qui parsèment la côte de Flores, puis prends du temps à observer les dauphins. Des daupins communs, puis des Graupas, gros dauphins globicéphales de couleur blanche. Très étonnant. Nous n'en n'avions jamais vu de cette espèce.

De retour sur Horta ou l'ambiance rassemblement de marins nous attends, nous attendons tranquillement nos prochains équipiers : Meije, puis Renaud et Renée à Graciosa. Nous avons la chance d'être là pour accueillir l'arrivée de la course Les Sables - Horta, ou 24 Class 40 se bagarrent pour la victoire. A 2h du matin, Karine Fauconier et Giovani Soldini arrivent en tête sous l'oeil passionés de quelques spectateurs sur le quai. Nous pouvons cotoyer ainsi les pros de la voile: un autre monde et d'autres compétences par rapport à la navigation de plaisance. A la conférence de presse, les journalistes se montrant un peu défaillant, notre jeune ami Marc anime la discussion avec Karine et Giovani.

Nous étions venus à Horta pour déposer Arlette à l'avion. L'affaire d'une journée, tout au plus. Sous le charme de l'endroit, nous y resterons 3 semaines ! C'est aussi ça d'avoir du temps…

Pico

Après avoir copieusement arrosé de larmes et d'alcools avec nos amis du port d'Horta, Boisbarbu reprends la mer pour l'île toute proche : Pico. 22 milles nautiques nous conduisent au petit port de Lajes de Pico. Minuscule marina qu'il faut atteindre en louvoyant dangereusement entre les hauts fonds, brisants et autres traîtrises. Sans carte ni topo, bien sur, la marina venant juste d'être construite, et pas encore renseignée. Les 5 places pour voiliers étant déjà occupées, nous amarrons au quai d'accueil, que le clapot rend rapidement inconfortable.

Pico, c'est tout d'abord son grand volcan conique, haut de 2350m, l'emblème des Açores, que Meije et moi décidons de gravir en dépit des incertitudes météos. Partis sous le brouillard et la bruine, nous sommes vite accompagnés par les trombes d'eau et de fortes pluies cinglantes à l'horizontale. Heureusement que la pierre de lave agrippe bien nos semelles dans ces raides sentiers de scories, transformées en ruisseaux. Malgré le manque total de visibilité, nous sommes contents et frigorifiés d'avoir pu faire cette randonnée incontournable.

Pico, c'est aussi l'histoire, la tradition et la culture de la chasse à la baleine, pratiquée depuis des siècles jusqu'en 1980. Expositions et documentaires du musée sont impressionnants. Quel courage de ces baleiniers harponneurs, qui à l'appel de la vigie du village, quittaient précipitamment leur occupation pour sauter dans les baleinières, hisser les voiles et souquer les avirons, poursuivre le cachalot pour le harponner, le maîtriser et le ramener à terre pour le dépeçage. Aujourd'hui, seuls le Japon et la Norvège perpétue le massacre de nos plus grands mammifères. Comme l'indique le poster à la sortie du musée de Pico : «  Si nous le voulons, l'homme et la baleine ont encore une chance de survivre ».

Puis Pico, c'est enfin ses bons vins locaux, riches en arômes enivrants, comme la douceur de vivre de ces îles.

Graciosa

Boisbarbu quitte le petit port de Lajes de Pico sous les rafales de nord. Pas très rassuré, je grée le foc de route et nos cirés. A part quelques rafales, nous naviguons tranquille avec juste un ris dans la grand voile. Le détroit entre Pico et Faial nous réserve une bonne surprise : le départ de la régate Horta – Les Sables d'Olonne : 24 Class 40 se préparent à prendre le départ. Nous sommes au cœur du « circling » avant le coup de corne du départ, à 18h. Les 24 coques se bagarrent la meilleure position. Du grand spectacle ! Puis nous restons au mouillage du port d'Horta, pour repartir avant le lever du soleil, sans avoir à repasser les formalités portuaires. Les 55 milles qui nous séparent de l'île de Graciosa nous réservent aussi de belles surprises : dauphins et des baleines par deux fois. « Elle souffle ! », crie le cap'tain. « Qui ça ? » réponds Evelyne … Beau spectacle que ces baleines qui s'engagent dans le canal Sao Jorge.

A l'endroit précis ou nous avions mouillé devant la plage de Vila de Praia en 2001, un port de pêche a été construit. Boisbarbu s'y faufile et trouve même une place sur un catway.

Graciosa est connue pour être la plus paisible des Açores. Ses vieilles maisonnettes de pêcheurs, en pierre sèche de lave, ses cheminées cylindriques des fours à pain, ses moulins aux couleurs hollandaises, sa grande caldeira ou nous descendons à la rencontre du gouffre central : le « fournas ».

Nous y débarquons Meije qui laisse la place à Renaud et Renée, après avoir assistés à la « torada ». Tout le village est réuni, debout sur les hauts murs du front de mer, hors d'atteinte des 4 taureaux qui se succèdent dans la rue principale du village. Quelques jeunes intrépides défient la bête fumante, pour épater la galerie, au risque de se prendre un coup de corne.

Terceira

45 milles de traversée au portant, par une mer belle, dans un ballets de dauphins de toutes tailles, nous mène à Angra de Heroismo, sur l'île de Terceira. Ville classée au patrimoine de l'Unesco, elle mérite la visite. Après une nuit dans le port d'Angra, nous naviguons vers le port de Praia da Vitoria, ou nous attends Loïc (rencontré à Madère) et chercher Gérard A. et Raymond à l'aéroport. C'est aussi une base de l'OTAN, avec ses avions au gris inquiétant.

Visite de l'île dans une voiture de loc 6 places avec Loïc, visite du musée du vent, balade sur la Caldeira d'Enxofre, puis dans le gouffre de Carvao (énorme poche magmatique de 100m de haut, enfermée comme une grotte au centre du cratère) avant de laisser Renée et Evelyne à l'aéroport d'où elles s'envolent pour Lisbonne puis Grenoble. Moment d'émotion. Evelyne souhaite retourner sur Grenoble en avion plutôt qu'à la voile. Dans les situations les plus difficiles, elle est parvenue à surpasser ses peurs qu'elle a transformées en action, pour assurer la manœuvre, ou préparer un encas réconfortant. Son absence pendant la traversée retour pèsera lourd dans les compétences et le moral du bord. Mais je sais que sa décision est profondément réfléchie. Je la respecte et n'ai donc pas essayé d'argumenter. Il ne faut pas que le rêve d'un homme devienne le cauchemar d'une femme.

Ce vide féminin laisse la place à notre quatuor de marins, affairés aux derniers préparatifs de la traversée.

Souhaitez nous "bon vent!"

Gérard.

 

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