Le Journal de Bord de BOISBARBU

Cap sur Barcelone

Arrivé à bord le 28 Avril, le cœur léger à l'idée du départ, au bonheur de retrouver Boisbarbu fin prêt à l'issue de son grand carénage d'hiver, et joyeux d'avoir pu détourner le bus d'Arles jusqu'au chantier naval de Navy Service, je monte mon sac à bord avec sérénité.

Quelques bricoles à finir, quelques bouts à gréer sur le pont, un dernier coup de jet sur les passavants, quelques paluches calleuses à serrer de marins amis rencontrés au hasard des escales et le soleil se couche sur Port St Louis du Rhône.

Le lendemain, ce sont Evelyne et Raymond qui montent à bord juste pour assister à la mise à l'eau de Boisbarbu. Les amis André et Armelle (rencontrés en Tunisie puis à Pantelleria) qui nous proposent d'amarrer Boisbarbu à couple de leur fidèle Samoa pour la nuit, sont invités à bord pour l'apéro.

Le 30 Avril à l'aube, Boisbarbu se détache de la terre pour filer par ce canal qu'il connaît bien, conduit vers une nouvelle saison d'aventures.

La météo à 5 jours n'est pas fameuse. Pour ne pas rester bloqués ici nous adoptons la stratégie d'éviter le Golfe du Lion qui nous a déjà joué trop de mauvais tours, pour remonter vers l'ouest sur Sète, puis descendre vers Argelès avec la Tramontane. 12 heures de navigation au près nous permettent une relâche dans le port de Sète que nous quittons au petit matin pour descendre la côte languedocienne. Nous nous attendions à du vent, mais la rencontre est rude. Le foc de route (petite voile d'avant de 17 m2) et la grand voile avec 3 ris sont étarqués. La Tramontane d'ouest est violente et soulève une mer cassante même à quelques milles des côtes. Une mer de travers qui frappe de plein fouet la coque de Boisbarbu. Cette différence de 45 degrés avec le vent attendu, modifie gravement la donne : l'allure au près ou de travers soumet le bateau à des forces menaçantes. C'est le bruit du vent violent dans le gréement, du choc de la vague sur l'étrave, des objets qui se sont détachés dans les coffres, des gerbes d'eau froides qui nous lessivent régulièrement de la tête aux pieds. C'est l'équilibre à tenir chaque fois que le bateau est envoyé au lof dans un mouvement giratoire qui l'accélère et le couche sur l'eau. C'est la secrète inquiétude du skipper qui scrute le gréement tout neuf et provisoirement réglé, soumis aux intenses vibrations que lui imposent le vent et les vagues. Nos cirés, salopettes, gilets, harnais sont solidement capelés, mais n'empêchent pas l'eau salée de s'introduire ou de nous brûler les yeux. Nous retrouverons de l'eau partout dans le bateau : dans les coffres des cabines, du cockpit, dans le carré, sur les matelas. Une bonne séance de pompage et de séchage en perspective. Nous avons essuyé un fort coup de vent force 8 avec des rafales à 9. Fatigués nous trouvons un excellent abri au quai d'accueil du port d'Argelès. Malheureusement aucune photo de cet épisode, trop occupés que nous étions à maîtriser Boisbarbu.

Une fois la manœuvre et le rangement terminés, une douzaine de petites avaries réparées (par exemple l'éolienne qui s'est arrachée de son support et a failli partir à la mer, le coinceur de balancine explosé, le pilote automatique qui a brûlé son fusible), le gréement entièrement vérifié (bien testé pendant cette 1ère épreuve du feu: ce qui me rassure sur sa fiabilité pour la poursuite de cette saison), nous passons du bon temps avec Solange et Hubert, à Argelès pour le week end. Ils nous font découvrir cette jolie région par une belle marche sur les GRs de la tour de Madeloc, d'ou l'on observe remarquablement la rotondité de la terre. Les Pyrénées sont encore abondamment enneigés sur les pentes du pic Canigou. C'est pour nous une journée de relâche réparatrice bien méritée.

Dimanche 3 Mai, nous doublons le Cap Béar, puis le Cap Creus, vent arrière 27N sur une mer agitée mais qui nous parait tranquille comparée à la navigation sportive de l'avant-veille. Profitant de la poussée du vent régulier, Boisbarbu fait route directe sur Barcelone pour s'amarrer 24h plus tard au Port Vell au centre de la vieille ville catalane.

Barcelone la belle insolite, dont nous découvrons les fantaisies architecturales encore tout chancelant et salés de notre première nuit en mer. Puis Raymond pose son sac à terre au petit matin, pour rejoindre Strasbourg.

4 jours pour passer de bons moments d'amitié avec nos copains Thierry et Malysa, puis avec Marc (venu nous rejoindre de Madrid), et pour visiter Barcelone, découvrir les oeuvres de jeunesse de Pablo Ruiz Picasso, et toute la créativité de Joan Miro,

parcourir l'immense parc olympique (1992) et s'émerveiller devant les constructions de cet architecte de génie Antoni Gaudi: le Guel, la Pedrera, la Sagrada familia, le Palau de musica...

sans oublier la promenade des Ramblas, les ruelles étroites, les petites places et les bars à tapas !

Ah, Barcelone, tu nous manqueras, mais la mer n'attend pas: le projet de cette année est long en milles et la météo est propice au départ, même un vendredi...

Hasta luego !

 

 

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