Boisbarbu est reparti…

Jeudi 4 Mai 2006

 

Cette année encore, Boisbarbu repart pour quelques mois de navigation. Toujours en Méditerranée, et plus à l'Est, vers les pays du Moyen Orient : Syrie, Liban, Israël, Egypte, sans oublier Chypre dont on ne sait plus trop si elle est grecque ou turque.    

Pour faciliter les démarches administratives et rencontrer d'autres marins (les rencontres nous ayant un peu manquer l'an passé), nous avons choisi de nous inscrire au Rallye Nautique de Méditerranée Orientale : l'EMYR 2006 pour ceux qui préfèrent l'acronyme anglais.

 

Evelyne et moi sommes séduits par ce Rallye: Evelyne y voit un moyen de socialiser et de naviguer en relative sécurité ainsi qu'un attrait culturel incontestable. Quant à moi, ce voyage satisfait mon désir de dépaysement géographique ainsi que de navigations hauturières de plusieurs jours pour rallier un pays à l'autre.

 

Ce Rallye a vocation principalement culturelle et touristique, se donne comme objectif d'entraîner 83 voiliers à la rencontre de 12 sites classés par l'Unesco au patrimoine mondial, à travers 3 continents : Europe, Asie et Afrique.

 

Ce sera une flotte très cosmopolite : 26 bateaux britanniques, 14 allemands, 13 américains, 11 français, 6 hollandais, 3 suisse, 2 australiens, 2 norvégiens, 1 canadien, 1 japonais, 1 maltais, 1 néo zélandais, 1 suédois, 1 turc, sur lesquels navigueront 270 marins confirmés.             

Boisbarbu se joindra au Rallye le 2 Mai à Bodrum, aussitôt qu'Evelyne aura embarqué et que l'avitaillement sera complet. Pour préparer le bateau et le soigner des petits bobos de l'an dernier, je suis arrivé à Bodrum le 16 Avril. Deux semaines à bord, principalement à sec, dans le chantier d'Icmeler, ou j'ai pu entrecouper les longues séances de bricolage par de bons intermèdes autour d'une bière Efes avec quelques voisins de ponton.  

Ce qui m'a permis entre autre de me lier d'amitié avec le néo-zélandais Rod Heikell, bien connu des plaisanciers du bassin Méditerranéen, puisqu'il est l'auteur de la plupart des guides de navigation pour la Méditerranée.

En 1977, il embarque de Southampton (Angleterre) seul sur un frêle esquif de 6m, traverse le golfe de Gascogne pour rejoindre le Portugal, franchit Gibraltar et traverse la Méditerranée jusqu'en Turquie. Fasciné par les cotes turques, il prends des notes qu'il partage avec d'autres plaisanciers, puis a l'idée d'en écrire un guide de navigation, qu'il met à jour au fil des ans, et qui est maintenant traduit dans de nombreux pays. Il vit ainsi de sa passion. A travers ses récits, il fut pour moi une source passionnante d'anecdotes et d'expériences marines.  

Ces deux semaines au chantier, pour préparer Boisbarbu avant sa mise à l'eau sont remplies de longues journées de travail, au rythme des artisans locaux qui ont des journées de travail de 10h, y compris le samedi. Ce qui ne les empêche pas de faire des heures supplémentaires et de travailler le dimanche pour terminer la fabrication des bateaux avant leur mise à l'eau en Mai. Ces longues journées permettent de voir vraiment le boulot qui avance et d'engranger des résultats évidents. Avec tous les imprévus que constitue le bricolage sur un bateau, il faut bien ça. C'est en général un petit bricolage prévu d'être réalisé en 2 heures, qui se complique et prends des proportions souvent décourageantes pour demander finalement 2 jours pleins. Entre la centaine de petites choses à faire pour préparer un bateau, mes principales réalisations ont été :  

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un panneau d'instruments modernisé, intégrant l'informatique, l'instrumentation, la radiophonie. Démontage, câblage, mise en place, m'ont pris 3 jours en dépit de 10 jours de travail préparatoire cet hiver à Eybens.

•  Traitement de la quille en plomb contre l'oxydation marine : décapage, ponçage, 7 couches successives de primaires, époxy, mastic, antifouling, m'ont pris 2 jours.

•  Préparation et lissage de la coque et de sa peinture antifouling : 2 jours.  

•  Vernissage des aménagements intérieurs les plus atteints par l'eau de mer et les rayons UV : 3 jours pour poncer sans mettre de la poussière partout, et 3 couches de vernis nécessitant souvent des ponçages inter couches.  

•  Entretien des winches : démontage, nettoyage, graissage : 2 jours  

Vendredi 28, dans la soirée, tout le travail indispensable à l'air de se terminer. Je vais arroser ça avec Yannick et Danielle dans un petit restau qui régale les ouvriers des chantiers alentour. Pour 4 Euros, on a bien dîné.  

Samedi 29 à 8h30 le travelift vient lever Boisbarbu et le déposer délicatement dans l'eau. Vérifications d'usage avant d'être complètement lâché. Mince !!! Entrée d'eau importante par la gate moteur. Le presse étoupe fuit abondamment. Boisbarbu ne peut pas prendre la mer. Je fais relever. Démontage de la pièce défectueuse : un joint à lèvres Volvo qui assure l'étanchéité entre l'arbre moteur et le tube à étambot. Le chantier me sort de suite la pièce de son stock. Je suis vraiment surpris : en France, cela m'aurait pris plusieurs jours pour en trouver une. Ces gars là sont vraiment des pros, et super équipés pour le service client. Malheureusement, au moment de mettre le nouveau joint en place, je constate un décentrement de l'axe moteur dans l'étambot. C'est rédhibitoire, il faut ré aligner le moteur. Et là il me faut un spécialiste. La responsable du chantier me le planifie pour mardi matin. Je suis donc bloqué ici quelques jours de plus, et vais prendre du retard pour l'avitaillement. Tant pis…

Le mécano est très rigoureux, un véritable horloger. Il ajuste l'alignement au 100 ème de mm. Il découvre que 3 des boulons de fixation du moteur, sont cisaillés, ce qui explique son décentrement. Ce cisaillement a pu être la conséquence du jour où on s'est pris un orin dans l'hélice, en juillet 2005. Le joint assez souple a rempli sa fonction l'an dernier, et s'est desséché pendant l'hiver pour mettre en évidence la fuite et le désalignement aujourd'hui.

Mardi 13h : mise à l'eau à laquelle participe le mécano et Jody, la chef de chantier pour vérifier que tout est en ordre. De vrais pros, je vous dis. Rod, Danielle et Yannick sont là pour nous souhaiter bon vent.

Juste avant nous, Sadun Bora, considéré comme le Moitessier turc, met à l'eau son « Kismet », avec lequel il a parcouru plusieurs tours du monde en solitaire, dés les années 60.  

La voile est hissée, les premiers bords au près ébrouent notre fidèle compagnon. Nos premiers gestes sont encore maladroits, ceux d'un violoniste qui n'aurait pas touché son instrument depuis des mois. Il nous faut faire nos gammes. Boisbarbu a besoin de temps pour reprendre confiance pour enfin se laisser vibrer puis se détendre.  

Evelyne m'avait rejoint dimanche (le 30 Avril). Nous peaufinons l'avitaillement et après une nuit dans un mouillage désert, nous avons rejoint la marina de Turgut Reis, ou nous tombons par hasard sur les quais, quelques copains rencontrés l'an dernier : Jean-Pierre sur « Maeva Nui » qui se dirige vers la Grèce, Ginette et René sur « Yaka » qui remonte vers la Sicile, ainsi que Guy et Sylvie de « La Ruche des Mers » à Port St Louis, en partance pour Port Said.

C'est un bien petit monde que celui des marins !  

Turgut Reis est aussi notre point de rencontre avec le Rallye EMYR2006.

Le cap va être mis sur l'est de la Turquie : Gocek, Kekova, Finike, Antalya, que nous connaissons de l'été dernier, puis Alanya, Girne, Mersin, d'ou nous quitterons les eaux turques.

Joli mois de Mai à vous,

Evelyne et Gérard.

 

 

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