Mai 2001 - Périple (à suspens) dans les Iles Turks & Caicos et les Bahamas à bord de Bois Barbu
Un récit de Martine Faure

Arrivee le 27 Avril a Saint-Domingue. Apres une breve visite des vestiges historiques de la ville, je retrouve Alain le 28 au matin.
Nous traversons le pays du Nord au Sud en bus en traversant 2 chaines de montagnes, dans des paysages tres riants, ponctues de champs de canne a sucre et de bananiers.
Nous retrouvons Evy et Gerard, en pleine forme, dans le petit port de Luperon, sur la cote Nord-Ouest, a l'heure convenue. Apres un sympathique pot de bienvenue, nous emmenageons sur Bois Barbu et larguons immediatement les amarres afin d'eviter un fond froid attendu tres prochainement sur les Iles Turks & Caicos.

Turks & Caicos
Un chapelet de 8 iles et d'innombrables ilots (Cayes), surnommes "Les iles oubliees", encore territoire britannique, peuple de quelques 15000 habitants, a 150 km au Nord de la Republique Dominicaine. Malgre un debut d'americanisation, ces iles aux plages d'un blanc immacule, aux lagons paradisiaques bleu turquoise, ont jusqu'ici echappe au developpement d'un tourisme de masse.
Notre premiere halte sera Sandy Cay, une bande de sable a la vegetation clairsemee d'arbustes epineux, bordee d'un recif de corail grouillant de poissons multicolores, du bleu turquoise au bleu nuit, jaune ou blanc tachete de noir. Le debut de l'evasion totale... Nous commencons a oublier nos montres, le temps et le stress!

L'ile de Grand Turk ou nous accomplissons les formalites douanieres, capitale des Turks & Caicos, fut le premier point d'entree de Christophe Colomb dans le Nouveau Monde en 1492. Il y rencontra les Indiens Lucayo, qu'il reduit en esclavage ou extermina. L'industrie du sel fut la ressource principale de l'ile pendant 250 ans, avec la culture du coton et du sisal, d'ou la presence de marais salants sur l'ile. Elle a ete supplantee par le tourisme et un peu de peche locale. Il est Dimanche apres-midi, la chaleur est intense et nous sommes attires par des chants joyeux a l'interieur d'une petite eglise blanche. Tres rapidement nous sommes invites a entrer et a participer a l'office religieux, par les membres de cette congregation Haitienne des Temoins de Jehovah, exhilee sur l'ile.


Apres une navigation delicate en direction des Ambergris, dans une mer peu profonde, parsemee d'innombrables recifs de corail (et d'epaves de bateaux s'etant fait surprendre par ces recifs affleurants, souvent peu visibles). Aucun bateau en vue pendant des heures,une mer d'un turquoise tres pur, un vrai decor de carte postale.
Nous poursuivons ensuite vers Providenciales, l'ile principale de l'archipel et centre de plongee, entoure de parcs nationaux marins. Nous l'abordons avec maintes precautions, avec parfois 20 cm d'eau sous la quille de Bois Barbu. Le village de Cockburn nous decoit par son abord tres americanise. Nous nous armons de patience pour effectuer toutes nos demarches administratives en essayant de nous adapter a la lenteur habituelle du rythme de vie de ces iles du bout du monde.

Bahamas: De Providenciales a Long Island
Apres un lever precoce, nous larguons les amarres pour une longue journee de navigation et mouillons sur la cote ouest de Mayaguana, pour nous diriger vers Long Island, d'ou notre ami Alain doit repartir pour l'Europe le 6 mai.
Nos plans de mouillage intermediaire a Crooked Island sont rapidement compromis par le manque de vent dans un premier temps, puis l'entree dans le fond froid attendu depuis notre depart de Republique Dominicaine qui rendra trop dangereux un abordage de nuit au milieu des recifs de corail.
Au large de Crooked Island, le vent passe soudain de 2 a 35 noeuds (Force 8), et plusieurs grains se succedent. La mer bleu cobalt tourne au gris argente, le ciel
prend des couleurs grises tres nuancees, du gris le plus sombre au gris rose. Mer agitee, tonnerre et eclair font monter quelque peu la tension au sein de l'equipage. Gege assume avec son sang-froid et son professionalisme habituels. Au bout de 30 minutes, le calme est de retour. Nous nous relayons toute la nuit en quarts successifs ponctues de vents tres irreguliers dans leur force et leur direction. Succede une longue matinee de navigation au pres. Nous essayons d'atteindre avec difficulte le cap Santa Maria, au Nord de Long Island, ou nous mouillons dans un superbe lagon aux eaux turquoises, ferme par des bancs de corail: la baie de Calabash.
Au total 38 heures de navigation non-stop, riches en experiences variees: fond froid, grains, quarts de nuit.
Deja la prochaine perturbation arrivant de Floride s'annonce: dans la nuit du 6 au 7 Mai, le vent forcit jusqu'a 25 noeuds dans la baie. Notre mouillage est tres roulant et la nuit agitee. Le 7 mai, avis de vents tres forts pour plusieurs jours. Allons-nous rester immobilises a Long Island, incapables d'aborder sur l'ile, la mer agitee rendant impossible l'utilisation de notre dinghy, alors que nous attend le splendide archipel des Exumas?
Nous captons des avis de detresse sur la VHF (voiliers, bateaux de peche) au large du Cap Santa Maria tout proche. Nous decidons de ne pas nous aventurer en mer et de rayer de notre programme les visites bien tentantes prevues a Rum Cay et a Concepcion Island, celebres pour l'incomparable beaute de leurs recifs coralliens. Nous donnons la priorite a la securite, nous installons dans un mode d'attente: moments privilegies dedies a la lecture. Nous decidons de rester "philosophes": n'y a t-il pas de plus grand malheur que rester bloque dans un lagon paradisiaque avec bouquins et musique ?
Nous resterons ainsi au mouillage pendant 3 jours jusqu'au 9 Mai avant de pouvoir mettre le cap sur Great Exuma.

Great Exuma : une entrée forte en emotions
Un parcours de 25 miles avec bonne mer et von vent.
A l'entrée du mouillage Sud de Georgetown, des rochers impressionants et des deferlantes de plus de 4 metres de hauteur nous attendent. Un spectacle majestueux d'enormes vagues bleu turquoise intense, ourlees d'ecume blanche:
malgre l'anxiete qui regne a bord, nous essayons de capter quelques images au passage sur nos appareil photo. Quel chemin suivre au milieu de ces bas-fonds sans nous faire submerger et sans fracasser Bois Barbu et son equipage contre un rocher? Decontenances par la violence de ces enormes rouleaux, nous decidons de faire appel aux conseils du Chef de port et de l'appeler a notre rescousse afin de rejoindre mouillage en toute securite. Apres 15 minutes d'attente au milieu des deferlantes, nous apercevons avec soulagement une petite barque a moteur qui nous prend en charge jusqu'au mouillage. Il nous en coutera 80$, mais qu'est-ce que 80$ pour une arrivee a bon port, dans une mer demontee. Les "french folks" que nous sommes deviennent "celebres" dans le port aupres de tous les bateaux au mouillage qui ont suivi le deroulement de nos peripeties sur la VHF.
Georgetown est un fort joli mouillage, le premier mouillage calme depuis la Republique Dominicaine, un petit village du bout du monde aux facades multicolores, un point de rencontre de tous les aventuriers qui viennent ici partager impressions et bons tuyaux sur les delicats passages entre hauts-fonds et bancs de corail presents dans toutes les Bahamas. Nous passerons encore 3 jours dans ce beau mouillage, dans un merveilleux lagon tres calme, bien que cerne par des vagues rugissantes.
C'est ici que nos directions se separent : Je prends l'avion pour Nassau puis l'Europe. Evy et Gege remontent progressivement les Exumas en direction de Nassau, puis la Floride.

La vie a bord de Bois Barbu
Atmosphere tres detendue et conviviale, partagee entre quelques manoeuvres, surveillance des recifs , discussions innombrables et la chaleur habituelle de l'accueil d'Evelyne et Gerard: aperitifs et cocktails tropicaux prepares par Gege, passe maitre dans la confection des Ti-punches et pina colada(s); bons petits plats mijotes par Evelyne.
Gege toujours tres actif, n'en finit pas de preparer les itineraires, de bricoler et de realiser les innombrables reparations inevitables a bord et gere toutes les difficultes et surprises de ce long periple avec un grand professionalisme.
Nous faisons de multiples rencontres avec de nombreux marins au long cours sillonnant les mers entre Floride, Bahamas, Caraibes et Europe depuis 5 ans, 15 ans et prenons plaisir a ecouter leurs aventures. A chacun son reve! Quelle merveilleuse opportunite que de pouvoir le partager avec Evelyne et Gege.

Nous ne pouvons que remercier de tout coeur Evelyne et Gege de nous avoir fait participer a cette magnifique aventure et inoubliable experience dans des conditions privilegiees et dans une atmosphere de chaude amitie.

Martine

 

 

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